Le lien entre le papillomavirus humain (HPV) et différents types de cancer n’est connu que depuis quelques décennies. Aujourd’hui, on le sait : certains types de HPV sont les principaux responsables de l’apparition du cancer du col de l’utérus ainsi que d’autres tumeurs de la région génitale et de la tête et du cou. Depuis, les progrès de la médecine ont été couronnés de succès : les vaccins, les nouvelles méthodes de dépistage et les approches thérapeutiques innovantes offrent des moyens efficaces de prévenir ou de traiter à un stade précoce les infections à HPV et leurs graves conséquences.
Une infection par le papillomavirus humain (HPV) peut bouleverser toute une vie. Mais la plupart des personnes ne remarquent rien au début, car de nombreuses infections à HPV guérissent d’elles-mêmes. Toutefois, certaines persistent et peuvent provoquer des années plus tard de graves maladies telles que le cancer du col de l’utérus, du rectum ou de la gorge.
En Suisse, environ 250 nouveaux cas de cancer du col de l’utérus sont diagnostiqués chaque année, et environ 70 femmes en meurent1. Ce cancer tue des centaines de milliers de personnes dans le monde2. Pourtant, une grande partie de ces tragédies pourrait être évitée, car la recherche et la médecine offrent aujourd’hui des options efficaces, du dépistage précoce et aux traitements innovants en passant par la vaccination.
Que sont les papillomavirus humains (HPV) ?
Il s’agit d’un groupe de plus de 200 types de virus différents. Une quarantaine affecte les muqueuses de la région génitale et d’autres régions. Certains types provoquent des verrues génitales bénignes. D’autres, appelés HPV à haut risque, peuvent entraîner l’apparition d’un cancer2.
Le HPV est principalement transmis par voie sexuelle. On estime que plus de 80 % des personnes sexuellement actives sont infectées par le HPV au moins une fois dans leur vie2. Dans la plupart des cas, l’infection est sans conséquence, mais dans un petit groupe, elle peut avoir des répercussions graves.
De la menace à l’opportunité : principales étapes de la recherche sur le HPV
Il y a encore quelques décennies, le lien entre le HPV et le cancer était peu connu. Les femmes atteintes d’un cancer du col de l’utérus avaient souvent de mauvais pronostics. Grâce à des recherches révolutionnaires, il est clair aujourd’hui que presque tous les cas de cancer du col de l’utérus sont dus à une infection chronique par le HPV à haut risque2.
Ces avancées ont permis le développement de vaccins contre le HPV. Ces derniers sont disponibles depuis 2006 et protègent de manière ciblée contre les types de HPV les plus dangereux. Les nouvelles générations de vaccins couvrent désormais encore plus de types de virus et offrent ainsi une protection accrue2.
La détection précoce a également fait de grands progrès. Le frottis cervical classique a été complété par des tests modernes de dépistage du HPV qui permettent de détecter les infections beaucoup plus tôt, avant même que des modifications cellulaires pathologiques ou même un cancer ne se développent4.
Parallèlement, la recherche thérapeutique progresse également en permanence : les scientifiques travaillent au développement d’immunothérapies innovantes pouvant être utilisées de manière ciblée contre les tumeurs existantes associées au HPV6.
La vaccination : un triomphe de la prévention
Les vaccins contre le HPV mentionnés plus haut constituent aujourd’hui un élément très important de la prévention. Ils préviennent les infections par les types de HPV les plus dangereux – et donc la plupart des cas de cancer du col de l’utérus3. En Suisse, la vaccination est recommandée à toutes les filles et tous les garçons de 11 à 14 ans1. Les vaccinations de rappel sont possibles jusqu’à l’âge de 26 ans. Dans les régions où le taux de vaccination est élevé, l’incidence des lésions précancéreuses a déjà diminué dans une proportion allant jusqu’à 88 %3.
Outre l’utilisation généralisée de vaccins à l’efficacité avérée, la recherche sur de nouvelles approches encore plus ciblées progresse également en permanence. Un candidat vaccin ciblant spécifiquement les tumeurs HPV16 positives est un exemple impressionnant des progrès réalisés. Les premières études montrent une amélioration significative de la survie chez les personnes atteintes d’un cancer du col de l’utérus ou de la tête et du cou6. La technologie de l’ARNm, connue dans le monde entier depuis la crise de la COVID-19, est elle aussi de plus en plus étudiée dans le cadre du développement de vaccins et de traitements contre le HPV3.
Détection précoce : arrêter le cancer avant qu’il ne se développe
Même si une infection a déjà eu lieu, la médecine offre une protection : des tests HPV et des frottis cervicaux réguliers permettent de détecter précocement les modifications cellulaires. Les tests modernes sont plus sensibles que les méthodes classiques et permettent une prévention encore plus ciblée4. En Suisse, un dépistage est proposé aux femmes âgées de 21 à 70 ans1. De nouvelles recommandations portent sur l’utilisation des tests de dépistage primaire du HPV, qui permettent de détecter directement une infection virale plutôt que des modifications cellulaires. Les premières études suggèrent que cela pourrait encore améliorer le taux de détection3.
Nouveaux horizons : des thérapies prometteuses
La recherche ne s’arrête pas à la prévention. Les scientifiques développent actuellement des thérapies prometteuses pour le traitement de cancers existants associés aux HPV. L’accent est mis sur différentes approches innovantes. Les immunothérapies visent à activer le système immunitaire de l’organisme et à le diriger spécifiquement contre les cellules tumorales HPV positives6. À cela s’ajoute la recherche sur des vaccins thérapeutiques, qui certes ne protègent pas contre les infections comme les vaccins classiques, mais agissent contre les infections à HPV préexistantes et les cancers qui en résultent. Les thérapies géniques, capables de réparer ou de détruire de manière ciblée les cellules malades, ouvrent également de nouvelles perspectives de traitement. Les immunothérapies personnalisées, adaptées individuellement aux caractéristiques génétiques et moléculaires d’une tumeur, sont particulièrement intéressantes. Ces approches prometteuses font actuellement l’objet d’études cliniques et pourraient jouer un rôle important dans le traitement du cancer à l’avenir6.
La recherche médicale au service d’un avenir sans HPV en Suisse
La Suisse s’engage fortement dans la lutte contre le HPV. À l’échelle nationale, les programmes de vaccination, les campagnes de sensibilisation et les projets scientifiques tels que le « Swiss HPV Vaccination and Screening Programme » montrent qu’il est possible d’obtenir des avancées lorsque la recherche, la politique et la société travaillent ensemble1. Siège de nombreuses entreprises biotechnologiques et pharmaceutiques innovantes, la Suisse investit chaque année des milliards dans la recherche médicale. Les projets de développement de nouveaux vaccins ou d’approches thérapeutiques originales contre le HPV profitent de cet environnement dynamique.
1 Office fédéral de la santé publique (OFSP). Informations sur le HPV, 2023.
2 OMS. Global strategy to accelerate the elimination of cervical cancer, 2022.
3 Lancet. Population-level impact and herd effects following human papillomavirus vaccination programmes: a systematic review and meta-analysis, 2021.
4 Ligue suisse contre le cancer. Cancer du col de l’utérus et HPV.
5 Gavi, the Vaccine Alliance. HPV Vaccine Programmes, 2023.
6 De Vos van Steenwijk PJ et al. ISA101 and immune-checkpoint blockade: a phase 2 study. Lancet Oncol. 2019.
Le cancer du poumon est l’un des cancers les plus mortels au monde – souvent diagnostiqué tardivement, il est stigmatisé socialement et émotionnellement éprouvant. C’est précisément pour cette maladie que la recherche médicale a fait d’énormes progrès ces dernières années. Ces avancées ont été rendues possibles par des investissements ciblés dans l’oncologie, avec une forte participation d’entreprises pharmaceutiques suisses engagées dans la recherche.
De la condamnation à mort à l’espoir de temps et de qualité de vie
Jusqu’au milieu du XXe siècle, le cancer du poumon était considéré comme une maladie rare. Ce n’est qu’avec la forte généralisation du tabagisme que le nombre de cas a grimpé en flèche – d’abord chez les hommes, puis plus tard chez les femmes1. Aujourd’hui, le cancer du poumon est l’un des cancers les plus fréquents dans le monde et la première cause de décès par cancer. En Suisse, près de 4900 personnes en souffrent chaque année, la plupart d’entre elles étant âgées2.
Jusque dans les années 1990, le cancer du poumon n’était généralement diagnostiqué qu’à un stade avancé, souvent avec des tumeurs déjà métastatiques et donc un mauvais pronostic. Le taux de survie à 5 ans a longtemps été inférieur à 10 %3. Grâce aux progrès en matière de diagnostic et à une nouvelle génération de thérapies ciblées et immuno-oncologiques, les possibilités de traitement se sont nettement améliorées depuis. Ainsi, le taux de survie à 5 ans a pu être porté à 30 % chez les personnes atteintes en 20243.
L’élément décisif de ce changement a été la prise de conscience que le cancer du poumon n’est pas une maladie uniforme. La classification en cancer du poumon à petites cellules (CPPC) et en cancer du poumon non à petites cellules (CBNPC) – ce dernier représentant environ 85 % des cas – constitue aujourd’hui la base du choix du traitement4. Le traitement ciblé a nettement amélioré le pronostic pour un grand nombre de patientes et patients, tout en étant mieux toléré par rapport aux traitements conventionnels.
Le tabagisme reste de loin le principal facteur de risque. D’autres facteurs, tels que la pollution atmosphérique, l’exposition professionnelle à des agents cancérigènes (p. ex. l’amiante) et la prédisposition génétique, jouent un rôle complémentaire, en particulier chez les non-fumeurs ou les jeunes malades1.
La recherche pour sauver des vies : vers une thérapie moderne
Pendant des décennies, la thérapie classique s’est articulée autour de la chirurgie, de la radiothérapie et de la chimiothérapie à action non spécifique, souvent avec des effets secondaires considérables. Le renversement de tendance est survenu grâce à une meilleure compréhension moléculaire de la biologie tumorale : les chercheurs ont découvert des mutations et des facteurs de croissance à l’origine du cancer et ont commencé à mettre au point des thérapies ciblées. Aujourd’hui, il existe des thérapies ciblées (tels que les inhibiteurs de l’EGFR, de l’ALK ou de la ROS1) et des immunothérapies qui activent le système immunitaire afin qu’il détecte et détruise les cellules cancéreuses5. Une étape importante a été l’autorisation des premiers inhibiteurs de points de contrôle, qui peuvent prolonger significativement la survie de certains groupes de patients, avec une bien meilleure tolérance que les cytostatiques classiques utilisés dans le cadre des chimiothérapies.
La Suisse comme pôle d’innovation en oncologie
Même si le cancer du poumon fait l’objet de recherches à l’échelle mondiale, la Suisse joue un rôle central. La solide recherche fondamentale et la mise en réseau de tous les acteurs de la recherche sont essentielles pour le succès de la Suisse. Des études internationales sont menées dans des cliniques locales et des entreprises pharmaceutiques de toute la Suisse participent directement au développement de nouveaux principes actifs. La Suisse est l’un des pays leaders en matière de recherche clinique en oncologie, avec une forte participation aux études et une implémentation rapide dans les soins6. Plus de 70 principes actifs oncologiques sont en cours de développement pour lutter contre le cancer du poumon, la Suisse participant à la mise au point de bon nombre d’entre eux7. La recherche vise à rendre les thérapies non seulement plus efficaces, mais aussi mieux tolérées et plus ciblées.
Les universités, les hôpitaux et l’industrie collaborent étroitement pour faire progresser le diagnostic basé sur les biomarqueurs et les thérapies médicales de précision, avec pour exemple l’association de l’immunothérapie et de la chimiothérapie, qui est désormais considérée comme le traitement standard du cancer du poumon non à petites cellules avancé, avec de bons résultats chez certains groupes de patients5.
Le cancer du poumon repensé : la précision plutôt que la généralité
Le cancer du poumon a longtemps été considéré comme une maladie difficile à traiter, mais grâce aux diagnostics modernes et aux approches thérapeutiques ciblées, le tableau évolue de plus en plus. Aujourd’hui, l’accent n’est plus uniquement mis sur le type de maladie, mais sur le profil tumoral individuel : quelles modifications génétiques stimulent la croissance ? Quelle réponse immunitaire peut être activée ?
Cette approche personnalisée – soutenue par des tests moléculaires – permet de mettre en place des thérapies ciblées plus efficaces et mieux tolérées. Ce qui était autrefois traité de manière uniforme par chimiothérapie est aujourd’hui envisagé de manière différenciée et de mieux en mieux soigné.
En Suisse, on constate justement qu’en conjuguant l’excellence clinique, la recherche pharmaceutique et l’innovation technologique, de nouvelles voies s’ouvrent pour les patientes et patients atteints d’un cancer du poumon – des voies qui peuvent sauver des vies.
1 Goeckenjan G.: Lungenkrebs – Geschichtliche Entwicklung, derzeitiger Stand und Ausblick – https://www.thieme-connect.com/products/ejournals/pdf/10.1055/s-0030-1255636.pdf
2 Office fédéral de la statistique (OFS): Statistiques de la santé en Suisse
3 Ligue suisse contre le cancer: Statistique sur le cancer du poumon 2023 – www.krebsliga.ch
4 American Cancer Society: Lung Cancer Types – www.cancer.org
5 Swiss Cancer Research Foundation: L’oncologie en pleine mutation – Rapport annuel 2022
6 Interpharma: La recherche pour un avenir en meilleure santé – Rapport 2023
7 Pharmaceutical Research and Manufacturers of America (PhRMA): Medicines in Development – Oncology 2023
Des écrits remontant à l’Antiquité faisaient déjà référence à l’excès de poids corporel, mais pendant des millénaires, les dessous de ce phénomène sont restés obscurs. Le surpoids a longtemps été considéré comme l’expression d’un manque de discipline. Les personnes corpulentes faisaient l’objet de moqueries ou étaient marginalisées. Ce n’est qu’au XXe siècle que la médecine a commencé à reconnaître la véritable nature de l’obésité, à savoir une maladie chronique complexe aux causes multiples1.
Premiers jalons scientifiques
C’est au XIXe siècle que des chercheurs ont découvert pour la première fois des liens entre le métabolisme, les hormones et le poids corporel. Cependant, la compréhension des mécanismes complexes du corps humain a longtemps fait défaut. Une véritable avancée a finalement été réalisée en 1994 : la découverte de l’hormone leptine, un neurotransmetteur qui régule les réserves de graisse dans le corps via la sensation de faim, a marqué un tournant2.
D’autres recherches ont révélé que non seulement la leptine, mais aussi des hormones telles que la ghréline et le GLP-1 jouent un rôle décisif dans le contrôle de la faim et de la satiété3. Ces découvertes ont fondamentalement modifié la compréhension de l’obésité : cette maladie n’a plus été considérée uniquement comme une conséquence d’un manque de volonté, mais comme un problème médical.
Une nouvelle approche : les traitements hormonaux
Alors qu’autrefois, les régimes alimentaires et l’exercice physique constituaient les seules options thérapeutiques, la découverte des agonistes des récepteurs du GLP-1 a révolutionné le traitement de l’obésité. Il s’agit de médicaments ciblant la régulation hormonale de l’appétit. Ils imitent l’action de l’hormone intestinale naturelle GLP-1 qui est libérée après le repas et qui signale au corps qu’il est rassasié. Cela réduit la sensation de faim et l’apport alimentaire. Développés à l’origine pour contrôler la glycémie en cas de diabète de type 2, il s’est rapidement avéré que ces principes actifs influent non seulement sur le métabolisme du sucre, mais aussi sur le comportement alimentaire4.
Le renforcement de la sensation de satiété naturelle et le ralentissement de la vidange gastrique ont permis aux patientes et patients de perdre nettement et durablement du poids, une avancée qui a nourri pour la première fois l’espoir d’un traitement médicamenteux de l’obésité.
Les progrès de la médecine se ressentent au quotidien
En Suisse, les nouveaux traitements ont été introduits progressivement. Les premiers principes actifs ont été autorisés par Swissmedic dès 2016 pour la perte de poids. Ces principes actifs ont entraîné une perte de poids moyenne de 15 à 20 %, un ordre de grandeur qui n’était auparavant possible que par le biais d’interventions chirurgicales4. De plus, ils réduisent considérablement le risque de maladies concomitantes telles que le diabète, l’infarctus du myocarde ou certains cancers3.
Depuis peu, l’assurance-maladie obligatoire en Suisse prend en charge les coûts de ces thérapies dans des conditions strictes – une étape importante dans les soins5.
Un regard vers l’avenir
Mais la recherche ne s’arrête pas là. De nouvelles thérapies combinées, telles que les doubles agonistes du GLP-1/GIP, donnent des résultats encore meilleurs dans les études : les patientes et patients perdent jusqu’à 22 % de leur poids corporel6. À l’avenir, la médecine dite de précision, basée sur des profils génétiques, métaboliques et individuels, pourrait rendre les traitements encore plus ciblés et efficaces3.
Des innovations, telles que l’administration orale de GLP-1 ou les systèmes implantables permettant de libérer en continu des principes actifs, sont déjà en cours de développement.
Mutation sociale impulsée par la recherche médicale
Ce qui était avant tout perçu comme un échec personnel est aujourd’hui abordé sous un prisme nouveau. Les progrès de la médecine ont modifié durablement le tableau de l’obésité : exit la stigmatisation, place à une maladie chronique reconnue qui peut être traitée.
Pour des millions de personnes atteintes, cela rime non seulement avec une meilleure santé, mais aussi avec une meilleure qualité de vie et une meilleure participation à la société. Parallèlement, des thérapies efficaces soulagent également à long terme les systèmes de santé en réduisant les maladies secondaires et les coûts associés1. La recherche continue.
1 Office fédéral de la statistique (OFS). Poids corporel et santé en Suisse. Neuchâtel, 2022.
2 Friedman JM, Halaas JL. Leptin and the regulation of body weight in mammals. Nature. 1998.
3 Müller TD et al. Obesity pharmacotherapy: what we have, what we need, and what’s next. Nat Rev Drug Discov. 2022.
4 Wilding JPH et al. Once-Weekly Semaglutide in Adults with Overweight or Obesity. N Engl J Med. 2021.
5 Swissmedic. Informations professionnelles Saxenda® et Wegovy®.
6 Jastreboff AM et al. Tirzepatide Once Weekly for the Treatment of Obesity. N Engl J Med. 2022.
La migraine est longtemps restée une énigme médicale. Des millions de personnes en souffrent, souvent en silence, souvent incomprises. Les personnes souffrant de migraine le savent: elle arrive souvent soudainement et brutalement. La journée commence normalement, mais quelques heures plus tard, le martèlement se fait ressentir dans la tête. Ce qui peut sembler être un «fort mal de tête» pour un œil extérieur est en réalité une grave crise neurologique pour les personnes concernées.
Bref retour en arrière: des mythes aux molécules
Vers 3000 av. J.-C., des textes décrivaient déjà des états migraineux. Dans la vieille Europe, on a longtemps pensé que la migraine était causée par des «vapeurs ascendantes» dans le cerveau. Au XVIIe siècle, les mentalités ont peu à peu évolué. Le médecin britannique Thomas Willis a réalisé que la migraine était probablement liée aux vaisseaux sanguins, un pas décisif vers des approches thérapeutiques modernes.
Une maladie aux conséquences graves
Aujourd’hui, nul doute possible: la migraine est l’une des maladies neurologiques les plus fréquentes au monde. En Suisse, près d’un million de personnes en souffrent, soit une personne sur sept à une personne sur dix. Les femmes sont trois fois plus touchées que les hommes1. Malgré cette forte prévalence, l’étude de la migraine est restée le parent pauvre de la science pendant des décennies. Seule la recherche moderne a permis des avancées majeures dans la compréhension des causes de la maladie, avec des conséquences positives sur le traitement et la qualité de vie des personnes atteintes.
Une crise migraineuse n’est pas un mal de tête «normal», elle est l’expression d’un traitement très sensible des stimuli dans le cerveau. Près d’un quart des patientes et patients souffrent en outre d’une «aura», qui se traduit par des troubles visuels, des sensations d’engourdissement, des problèmes d’élocution ou des vertiges2. Ces crises peuvent durer plusieurs heures, voire plusieurs jours, et paralyser complètement la vie quotidienne. Rien qu’en Europe, les migraines causent chaque année des préjudices économiques se chiffrant en milliards, principalement en raison des arrêts de travail et des pertes de productivité3.
De nouvelles découvertes grâce à la recherche moderne
Pendant longtemps, la migraine a été considérée comme un trouble purement vasculaire, un point de vue qui s’est reflété dans les traitements standard de la seconde moitié du XXe siècle. Par conséquent, les médicaments administrés auparavant visaient surtout à provoquer une vasoconstriction. Mais la découverte du «système trigémino-vasculaire» dans les années 1980 a permis de réaliser de véritables progrès. Les chercheurs ont découvert qu’un plexus nerveux dans le cerveau interagit étroitement avec les vaisseaux sanguins des méninges4.
Au cœur de ce réseau se trouve un neurotransmetteur, qui, une fois libéré lors d’une crise migraineuse, déclenche une réaction inflammatoire dans le tissu cérébral: un mécanisme central qui est aujourd’hui considéré comme la principale cause des douleurs typiques5. Cette nouvelle compréhension de la maladie n’a pas seulement modifié la recherche, elle a aussi révolutionné les traitements.
Médicaments à effet ciblé
Sur la base de ces connaissances, un traitement médicamenteux agissant de manière ciblée sur les processus biologiques de la migraine a pu être développé pour la première fois. Les triptans ont été mis sur le marché dans les années 1990: ils inhibent la libération du neurotransmetteur tout en ayant un effet vasoconstricteur sur les vaisseaux dilatés. De nombreux patients et patientes ont profité de ce nouveau groupe de médicaments. Néanmoins, il s’est avéré que les triptans ne conviennent pas à tous, notamment aux personnes souffrant de maladies cardiovasculaires6.
C’est pourquoi les chercheurs ont planché sur d’autres mécanismes d’action et ont développé les gépants. Ceux-ci bloquent directement les récepteurs et ont un effet anti-inflammatoire sans la composante vasoconstrictrice. Ils sont en général bien tolérés et peuvent également être utilisés en action préventive7.
Le traitement par anticorps marque une autre étape importante. Il permet de réduire à long terme la fréquence des crises, une injection par mois étant souvent suffisante. Des études cliniques ont montré une amélioration significative de la qualité de vie des personnes souffrant de migraine chronique8.
Innovations futures: ce que l’avenir nous réserve
La recherche sur la migraine ne connaît pas de temps mort. Le travail se porte également sur des approches thérapeutiques personnalisées, adaptées aux caractéristiques génétiques de chaque personne atteinte. L’objectif est non seulement de mieux soigner, mais aussi de le faire avec précision9. De nouvelles approches non médicamenteuses sont également en cours de développement. Il s’agit, par exemple, de traitements dans lesquels des impulsions électriques ou magnétiques influencent de manière ciblée les régions du cerveau impliquées dans le déclenchement de la migraine10.
Les recherches vont même jusqu’à étudier la couleur de la lumière: les premières études cliniques indiquent que la lumière verte peut réduire l’intensité des douleurs migraineuses chez une partie de la patientèle11. Les technologies numériques font également leur entrée dans l’arsenal thérapeutique, avec des applications de traitement de la migraine qui documentent les crises, analysent les schémas d’évolution et aident ainsi à mieux identifier les déclencheurs individuels et à adapter les traitements12.
La recherche change des vies
L’histoire de la migraine est un exemple frappant de la manière dont la recherche médicale conduit à de véritables progrès. Ce qui fut une énigme des siècles durant est aujourd’hui compris et traité efficacement. Des millions de personnes bénéficient de médicaments ciblés et modernes, de meilleures méthodes de diagnostic et d’une nouvelle compréhension médicale de la maladie. Toutes ces améliorations sont le fruit de décennies de recherche. Interpharma s’engage à poursuivre sur cette lancée. En effet, le progrès a besoin de curiosité scientifique et d’une vision claire: traiter efficacement la migraine. La recherche continue.
1 Office fédéral de la santé publique (OFSP). Statistique suisse des céphalées et des migraines.
2 Ashina M. Migraine. New England Journal of Medicine. 2020;383(19):1866–76.
3 Lanteri-Minet M et al. Economic impact of migraine. Cephalalgia. 2011;31(8):867–79.
4 Goadsby PJ et al. Pathophysiology of migraine: a disorder of sensory processing. Physiological Reviews. 2017;97(2):553–622.
5 Edvinsson L. The CGRP pathway in migraine as a viable target for therapies. Headache. 2018;58(S1):33–47.
6 Tfelt-Hansen P, Olesen J. Taking the negative view of current migraine treatments. Headache. 2012;52(7):1159–65.
7 Dodick DW et al. Ubrogepant for the acute treatment of migraine. New England Journal of Medicine. 2019;381(23):2230–41.
8 Tepper S et al. Efficacy and safety of erenumab for preventive treatment of chronic migraine. Lancet Neurology. 2017;16(6):425–34.
9 Borsook D et al. Personalized medicine for migraine: an evolving landscape. Headache. 2021;61(5):725–35.
10 Chou DE et al. Noninvasive neuromodulation for migraine. JAMA Neurology. 2017;74(5):571–6.
11 Noseda R et al. A human fMRI study on green light and photophobia. Brain. 2016;139(Pt 7):1971–80.
12 Schwedt TJ et al. Use of smartphone technology in the management of migraine. Headache. 2019;59(6):802–16.
La première description connue des symptômes de l’hépatite date du Ve siècle avant Jésus-Christ. Cependant, à l’époque, personne ne savait d’où venait l’hépatite ni comment la traiter. Aujourd’hui, des vaccins efficaces protègent contre les hépatites A et B. Il n’existe pas encore de vaccin contre l’hépatite C, mais les traitements modernes portent les chances de guérison à plus de 95%.1
Méconnue pendant des siècles
Il est fait état d’épidémies de jaunisse, conséquence fréquente de l’hépatite, dès l’Antiquité. Ce n’est toutefois qu’au milieu du XXe siècle que l’on a découvert que l’hépatite était généralement provoquée par des virus. En 1947, le médecin britannique F.O. McCallum différencie pour la première fois les virus de l’hépatite A et de l’hépatite B. À la fin des années 1980, des chercheurs découvrent enfin le virus de l’hépatite C, qui évolue souvent de manière chronique et est donc considéré comme le virus de l’hépatite le plus dangereux. On estime que 400 millions de personnes sont infectées par l’une des variantes du virus et que plus de 1,3 million de personnes en meurent chaque année à travers le monde.2
L’hépatite est insidieuse, car de nombreux symptômes apparaissent à bas bruit. Il peut ainsi s’écouler des années avant que les personnes concernées ne se rendent compte d’une contamination, avec de graves conséquences pour le foie.
Vaccination contre l’hépatite : une avancée majeure
La prévention la plus efficace contre les hépatites A et B est la vaccination (également sous forme de vaccin combiné). Les premiers vaccins contre l’hépatite A ont été autorisés en Europe en 1991. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) les a ajoutés à la liste des médicaments essentiels, car ils offrent une protection contre l’une des maladies infectieuses les plus courantes dans les régions à risque comme l’Afrique, l’Asie, l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud, avec une efficacité comprise entre 95 et 99%. La vaccination est donc recommandée à tous les voyageurs qui se rendent dans un pays où le taux d’incidence de l’hépatite A est élevé.3
Le vaccin contre le virus de l’hépatite B est utilisé depuis 1984. En Suisse, il fait partie des vaccinations de base et offre aux personnes vaccinées une immunité de 10 ans. Après un rappel à l’âge adulte, cette immunité dure même des décennies.4 Introduite par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) en 1998,5 la recommandation vaccinale pour les adolescents a contribué de manière déterminante à la baisse continue du nombre de nouvelles infections par l’hépatite B en Suisse :

Nombre d’infections par l’hépatite B (nouveaux cas) en Suisse. (Source: Statista) https://de.statista.com/statistik/daten/studie/544724/umfrage/neuerkrankungen-an-hepatitis-b-in-der-schweiz/
Grâce à une couverture vaccinale élevée, la prévalence estimée au niveau mondial chez les enfants de moins de 5 ans a pu être réduite de 4,7% à moins de 1% au cours des 40 dernières années. Chez les personnes vaccinées, des études révèlent en outre une incidence trois fois plus faible d’une variante de cancer du foie déclenchée par ce virus. On peut à ce titre considérer le vaccin contre l’hépatite B comme un vaccin contre le cancer.4
Des progrès thérapeutiques grâce à des recherches ciblées
Une contamination par un virus de l’hépatite évoluant vers une forme chronique peut avoir de graves conséquences, allant jusqu’à provoquer une cirrhose ou un cancer du foie. Si l’hépatite A n’évolue jamais vers une forme chronique, cela peut en revanche se produire aussi bien pour l’hépatite B que pour l’hépatite C. Les nouveaux développements de la recherche médicale permettent néanmoins une bonne prise en charge des évolutions chroniques.
En cas d’infection par l’hépatite B, on utilise des agents antiviraux qui réduisent la charge virale dans le sang et préviennent ainsi les complications graves. Grâce aux nouvelles méthodes de diagnostic virologique, il est en outre de plus en plus facile de déterminer la meilleure option thérapeutique.
Le traitement de l’hépatite C a fait d’énormes progrès depuis la découverte du virus en 1989. Dans les premiers temps, les malades étaient traités par interféron pendant six à douze mois. Le taux de guérison était initialement inférieur à 20%, et le traitement s’accompagnait de lourds effets secondaires pour les patients. Au cours de la deuxième décennie, le taux de guérison a progressivement atteint 45%, notamment grâce à la combinaison avec la ribavirine. Des progrès décisifs ont finalement été réalisés au cours des deux dernières décennies. L’identification de la structure protéique a permis de développer de très puissants médicaments antiviraux présentant un excellent profil de sécurité. Une percée est finalement réalisée en 2015 avec le traitement sans interféron, tant en matière de taux de guérison que d’effets secondaires.6 Alors que l’hépatite C chronique était jusqu’à récemment la première cause de transplantation hépatique en Suisse, on en guérit aujourd’hui dans 98% des cas. Le virus est désormais éliminé après seulement 8 à 12 semaines en moyenne. Depuis 2022, tous les médicaments pour le traitement de l’hépatite C peuvent être prescrits sans restriction par un médecin.7 Les traitements issus de la recherche biomédicale performante ouvrent pour la première fois la voie à une perspective longtemps inimaginable : l’éradication de l’hépatite C à l’échelle mondiale et, par conséquent, le sauvetage de millions de vies humaines.
L’OMS s’est donc fixé pour objectif d’endiguer les hépatites B et C dans le monde entier d’ici 2030. Différentes mesures doivent être déployées à cette fin, avec les vaccins comme clé du succès. On peut s’attendre à ce que les progrès fulgurants réalisés dans le développement des vaccins contre le COVID-19 donnent également un coup de pouce au développement d’un vaccin contre l’hépatite C.8 Des recherches intensives sont également en cours pour trouver des options thérapeutiques encore plus efficaces contre l’hépatite B. En parallèle, le renforcement du diagnostic continue de jouer un rôle crucial dans la lutte mondiale contre l’hépatite.
1 Deutsches Bundesministerium für Bildung und Forschung (2019): Hepatitis – Eine unterschätzte Krankheit. https://www.gesundheitsforschung-bmbf.de/de/hepatitis-eine-unterschatzte-krankheit-mit-hoher-dunkelziffer-9689.php
2 Hépatite Suisse (2022): Qu’est-ce que l’hépatite? https://fr.hepatitis-schweiz.ch/tout-sur-hepatite/hepatite-cest-quoi
3 Robert Koch Institut (2019): Hepatitis A. https://www.rki.de/DE/Content/Infekt/EpidBull/Merkblaetter/Ratgeber_HepatitisA.html
4 Gerlich, Wolfram H. (2022): Hepatitis-B-Impfstoffe – Geschichte, Erfolge, Herausforderungen und Perspektiven. Bundesgesundheitsblatt 65: 170–182.
5 Office fédéral de la santé publique (2020): Vaccinations: faits et chiffres.https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home/strategie-und-politik/nationale-gesundheitsstrategien/nationale-strategie-impfungen-nsi/zahlen-fakten.html
6 Grätzel, Philipp (2019): Die Interferontherapie ist Geschichte. 13th Expert Summit on Viral Hepatitis, 10./11. Februar 2017, Berlin (Veranstalter: MSD). https://link.springer.com/content/pdf/10.1007/s15006-017-9415-x.pdf?pdf=button
7 Hépatite Suisse (2022): Les médicaments contre l’hépatite C peuvent désormais être prescrits par les médecins traitants. https://fr.hepatitis-schweiz.ch/news/neu-koennen-hepatitis-c-medikamente-auch-von-hausaerztinnen-verschrieben-werden
8 Swiss Medical Forum (2022): L’hépatite. c’est curable: une histoire à succès de la recherche biomédicale. https://medicalforum.ch/fr/detail/doi/fms.2022.09003
Un diagnostic précoce et la mise en place rapide de traitements adaptés sont les clés d’une prise en charge efficace de la polyarthrite rhumatoïde (PR). Cette maladie articulaire inflammatoire très répandue est apparue pour la première fois il y a des milliers d’années, mais il faut attendre le XXe siècle pour voir les premières avancées majeures. Aujourd’hui, la maladie peut être si bien contrôlée chez un nombre croissant de personnes qu’elles vivent presque sans douleurs.
Os millénaires et patients célèbres: la PR à travers les âges
Des ossements découverts prouvent que la polyarthrite rhumatoïde (PR) est apparue au moins 4500 ans avant Jésus-Christ. Des écrits ultérieurs font régulièrement état de maladies dont les symptômes correspondent à ceux de la PR. Un célèbre patient du XVIIe siècle est le peintre flamand Rubens, qui a souvent représenté des mains marquées par le rhumatisme dans ses œuvres tardives. Ce n’est qu’en 1859 que le médecin britannique Alfred Baring Garrod introduit pour la première fois l’appellation «polyarthrite rhumatoïde». À l’époque, les méthodes de traitement se limitaient à des remèdes traditionnels, comme l’hirudothérapie. Les patients se sont par la suite vus administrer des produits à base d’opiacés et d’alcool pour soulager les douleurs dans une certaine mesure.
Au début du XXe siècle, les progrès de la radiologie ont permis de poser un diagnostic plus précis de la PR et de la distinguer d’affections apparentées comme l’arthrose. Cela marque le début de l’ère moderne de l’approche de la PR. L’American Rheumatism Association reconnaît la PR comme maladie à part entière en 1941.
Comme pour de nombreuses maladies, l’or est utilisé dans le traitement de la PR à partir des années 1920. Les injections de sel d’or, dont les effets n’interviennent qu’au bout de six mois, sont considérées comme la première génération de médicaments de base contre la PR. Les médicaments de base sont également appelés DMARD (Disease Modifying Anti-Rheumatic Drugs) ou ARMM (antirhumatismaux modificateurs de la maladie). Ils ont un effet anti-inflammatoire et peuvent donc être utilisés à long terme en cas d’inflammations constantes chez les personnes concernées.
L’année 1948 marque un tournant dans la rhumatologie au XXe siècle: aux États-Unis, Philipp S. Hench a été le premier à utiliser la cortisone pour traiter la PR. Cela révolutionne non seulement la rhumatologie, mais aussi toute la médecine, améliorant ainsi la vie d’innombrables patients. Dans les années 1950, plusieurs ARMM synthétiques ont finalement été autorisés, à l’image de l’hydroxychloroquine, utilisée à l’origine comme antipaludéen.
Des avancées majeures dans la seconde moitié du XXe siècle
Les années 1960 et 1970 sont surtout marquées par de nouveaux développements diagnostiques permettant une classification différenciée des différentes maladies rhumatismales.
D’autres étapes importantes ont été franchies dans le traitement de la PR dans les années 1980 et 1990. Soulignons notamment le développement du méthotrexate. Dans les années 1980, cette substance qui fait partie des ARMM synthétiques a été rapidement utilisée à grande échelle pour son action anti-inflammatoire ciblée, ouvrant ainsi une ère entièrement nouvelle dans le traitement de la PR.
À la fin du XXe siècle, l’accent est placé sur le développement des produits biologiques. Ces substances actives interviennent dans le processus inflammatoire, par exemple en neutralisant les protéines qui transmettent les signaux inflammatoires. Parmi les produits biologiques, citons notamment les inhibiteurs du TNF alpha. Ces médicaments se distinguent par leur grande efficacité, produisant chez les patients de meilleurs taux de réponse que jamais auparavant. Le domaine des produits biologiques a connu divers nouveaux développements et perfectionnements au cours des années qui ont suivi. Pour un nombre croissant de patients, ces avancées ont été porteuses d’espoir d’une progression plus lente de la maladie, voire d’une rémission (on entend par là un état peu symptomatique, défini selon certains critères).
Cette évolution rapide s’est poursuivie au cours des deux dernières décennies. D’une part, de nouveaux mécanismes d’action ont été identifiés et les préparations correspondantes ont été mises sur le marché (comme les anticorps dirigés contre le récepteur de l’interleukine-6 et les anticorps anti-CD20 dans le domaine des médicaments biologiques, ou les inhibiteurs de Janus kinase dans le groupe des médicaments de base synthétiques). D’autre part, les nouvelles connaissances ont également permis d’adapter la stratégie d’utilisation des préparations à base de cortisone. Celles-ci continuent de jouer un rôle important, mais peuvent désormais souvent être dosées plus faiblement.1
Une large gamme de médicaments est aujourd’hui disponible grâce aux progrès continus dans la recherche et le développement. Ceci est extrêmement important, car la PR évolue différemment d’un patient à l’autre, si bien que le traitement approprié doit être déterminé individuellement. Le traitement de la PR intègre aujourd’hui des antidouleurs classiques (antalgiques), des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) pour soulager la douleur et réduire l’inflammation, ainsi que des préparations à base de cortisone qui ont un effet anti-inflammatoire puissant. Les médicaments de ces groupes peuvent certes apporter un grand soulagement aux personnes concernées, mais n’ont aucune influence sur l’évolution de la maladie. Dépourvus d’effet analgésique, les ARMM ont en revanche un effet anti-inflammatoire sous leurs formes les plus diverses (synthétique conventionnelle ou ciblée, ou encore sous forme de produits biologiques).2
En revanche, à défaut de traitement médicamenteux optimal selon les connaissances actuelles, l’espérance de vie des patients atteints de PR est réduite, car une PR non traitée peut également s’étendre aux organes.3 Grâce aux traitements modernes de la PR, le nombre de décès liés à la maladie a toutefois pu être réduit de manière continue:

Décès liés à la PR chez les femmes âgées de 50 à 69 ans en Suisse (source: Global Burden of Disease (GBD)), https://vizhub.healthdata.org/gbd-compare/#

Décès liés à la PR chez les femmes âgées de 70+ ans en Suisse (source: Global Burden of Disease (GBD)), https://vizhub.healthdata.org/gbd-compare/#
Médecine de précision: diagnostic rapide et minimisation de la charge de morbidité
Les percées médicales de ces dernières années ont apporté un énorme soulagement aux patients et ont permis de réduire drastiquement le fardeau de la maladie. Les données portant sur près de 40 000 patients d’Allemagne indiquent par exemple une baisse significative de la charge de morbidité moyenne. La part de personnes présentant une faible activité de la maladie est passée à près de 50% au cours de la période considérée. Le contrôle optimisé de la maladie influe même sur les facteurs socio-économiques: le nombre de jours de maladie a pratiquement été divisé par trois entre le début et la fin de la période étudiée.4
On estime même qu’environ 70% des personnes atteintes de PR pourraient théoriquement atteindre une rémission au cours de la première année suivant le diagnostic. Atteindre un tel niveau exige toutefois d’établir un diagnostic précoce et de mettre en place le traitement adéquat.5 La disponibilité de nombreux médicaments aux mécanismes d’action différents permet d’adapter le traitement si nécessaire, jusqu’à atteindre l’objectif thérapeutique. Une combinaison de médicaments appropriés et de mesures de soutien telles que la physiothérapie permet de minimiser les troubles et de maintenir une qualité de vie adéquate.
La médecine de précision devrait également apporter de nouveaux progrès dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde dans les années à venir. L’analyse génétique des tissus articulaires permettra par exemple de prédire en peu de temps à quels médicaments un patient est susceptible de répondre. Bientôt, les personnes atteintes ne seront probablement plus réparties en différents groupes d’après des paramètres cliniques pour prédire l’efficacité des médicaments. Au lieu de cela, les signatures génétiques individuelles permettront de développer des schémas thérapeutiques sur mesure.6 Les séquelles d’une PR évolutive pourraient donc bientôt être de l’histoire ancienne.
1 Manger B. et al. (2020): 80 Meilensteine der Rheumatologie aus 80 Jahren. I-IV. Z Rheumatol.
2 Rheumaliga Schweiz (2021): Medikamente bei entzündlichem Rheuma.
3 Internisten im Netz (2017): Rheumatoide Arthritis: Prognose & Verlauf. https://www.internisten-im-netz.de/krankheiten/rheumatoide-arthritis/prognose-verlauf/#:~:text=Patienten%20mit%20rheumatoider%20Arthritis%2C%20die,um%203%2D13%20Jahre%20geringer
4 Fiehn, C. (2011): Rheumatoide Arthritis – Meilensteine für Klassifikation und Therapie. Dtsch Med Wochenschr 136: 203–205.
5 Deutsche Rheuma-Liga (2021): Rheumatische Erkrankungen: Zeit ist Remission. https://www.rheuma-liga.de/aktuelles/detailansicht/rheumatische-erkrankungen-zeit-ist-remission#:~:text=Theoretisch%20k%C3%B6nnten%20bis%20zu%2070,der%20Diagnose%20eine%20Remission%20erreichen
6 Northwestern University (2018): Rheumatoid arthritis meets precision medizine https://news.northwestern.edu/stories/2018/march/rheumatoid-arthritis-meets-precision-medicine/